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Parole de spécialiste — 16 minutes

Comment le stress influence votre santé gastro-intestinale

Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Vulgarisateur scientifique

Le stress est souvent décrit comme un fléau du monde moderne. Bien que l’humanité y ait toujours été exposée, ce n’est qu’au milieu du siècle dernier que le Dr Hans Selye, de l’Université de Montréal, a réussi à comprendre les mécanismes physiologiques qui sont en jeu [1]. On sait maintenant que le stress affecte tous les organes et fonctions du corps : du cerveau au système immunitaire, en passant par le cœur, les muscles et les os – sans oublier le système digestif, et plus particulièrement les intestins.

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La réponse au stress

Les événements stressants ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Si la quasi-totalité des gens sont alarmés par des bruits très forts ou des situations d’agression, seuls certains sont stressés de façon chronique par des événements plus banals de la vie quotidienne. Dans tous les cas, le cerveau déclenche une double réponse hormonale impliquant les catécholamines, d’une part, et le cortisol, d’autre part.

Les catécholamines

Les catécholamines, comme l’épinéphrine (adrénaline) et la norépinéphrine (noradrénaline), agissent comme premiers répondants aux situations qui sont interprétées comme une menace par le cerveau. Nous avons tous déjà ressenti une partie des effets secondaires qu’entraîne cette réponse lorsqu’on nous fait sursauter, lorsqu’on évite de justesse un accident ou encore lors d’une crise de panique : sueurs, augmentation de la fréquence cardiaque, du rythme respiratoire et de la tension artérielle, joues rouges, tremblements, etc. Ces effets désagréables cachent toute une série de mécanismes physiologiques importants qui se produisent simultanément et qui servent à fuir le danger ou à le combattre. La réponse des catécholamines est rapide, mais de courte durée. Elle devient nuisible si elle se répète trop souvent.

Le cortisol

En même temps qu’il stimule la production de catécholamines, le cerveau ordonne à l’hypophyse de stimuler la sécrétion de cortisol par les glandes surrénales. Conjointement aux catécholamines, le cortisol libère du glucose dans le sang pour satisfaire les besoins en énergie à partir des réserves de glycogène, des graisses et même des protéines. Il inhibe des fonctions coûteuses en énergie comme la croissance, la digestion ou la reproduction. Les effets du cortisol ne sont pas perceptibles comme ceux des catécholamines. Ils sont cependant présents à plus long terme et deviennent nuisibles si les épisodes de stress se répètent de façon chronique.

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Le stress et la santé gastro-intestinale

Le système digestif n’échappe évidemment pas aux effets combinés des catécholamines et du cortisol. Qui n’a pas ressenti des malaises comme un estomac noué, un ventre ballonné, les nausées et l’envie d’aller à la selle ou d’uriner avant ou pendant un événement particulièrement stressant? Ces phénomènes surviennent lorsque le cerveau dirige toute son attention vers la réponse de fuite ou de combat. Cette réponse implique une partie du système nerveux que l’on appelle le « système nerveux sympathique ».

Le prix à payer pour cette mobilisation du système nerveux sympathique, c’est la diminution de l’activité d’un autre réseau de nerfs, le système nerveux parasympathique. C’est lui qui, par l’entremise du nerf vague, détend normalement les muscles et augmente la vidange des intestins. En même temps que la vidange des intestins est ralentie par l’activité réduite du nerf vague, le nerf qui commande la vessie et le rectum, lui, demeure actif – d’où les envies impérieuses d’uriner et d’aller à la selle qui accompagnent le stress.

À long terme, les situations de stress chroniques peuvent entraîner de nombreuses complications gastro-intestinales en aggravant des atteintes déjà présentes comme [2] :

  • La maladie inflammatoire de l’intestin (MII)
  • Le syndrome du côlon irritable
  • Le reflux gastro-œsophagien
  • Les ulcères gastroduodénaux

Maladies inflammatoires de l’intestin

Plusieurs études démontrent que le stress chronique peut augmenter le risque de rechute chez les patients atteints de la maladie de Crohn ou de la colite ulcéreuse. Les mécanismes sont complexes, mais comprennent assurément la capacité des hormones du stress à diminuer la réponse immunitaire et à augmenter la réponse inflammatoire [3].

Syndrome du côlon irritable

Bien qu’on ne connaisse pas tous les mécanismes à l’œuvre, le syndrome du côlon irritable comporte une composante psychologique importante. Il y a une communication constante et bidirectionnelle entre le cerveau et les intestins, qui est parfois considéré comme notre « deuxième cerveau ». Cette communication impliquerait, en plus des médiateurs de la transmission nerveuse, des hormones sécrétées par le tube digestif et agissant sur le cerveau, ainsi que de nombreuses molécules produites par le microbiome (l’ensemble des bactéries qui colonisent l’intestin) [4].

Reflux gastro-œsophagien

Des études sur un grand nombre de sujets démontrent que le niveau de stress et d’anxiété est nettement plus élevé chez les personnes souffrant de reflux gastro-œsophagien que chez les autres [5].

Ulcères gastro-duodénaux

La très grande majorité des ulcères de l’estomac et du duodénum sont causés par une infection par la bactérie Helicobacter pylori. H. pylori agit en attaquant la muqueuse qui protège la paroi de l’estomac des acides produits lors de la digestion. Il a été observé qu’indépendamment des infections à H. pylori et de la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens, l’incidence des ulcères gastroduodénaux est plus élevée chez les personnes souffrant de stress psychologique que les sujets du groupe témoin [6].

Pour en savoir plus sur ces affections, consultez notre Petit guide sur les troubles digestifs.

Comment protéger les intestins des effets du stress

Pour protéger les intestins des effets du stress, il faut d’abord se protéger du stress lui-même. Il existe des dizaines de façons d’y arriver, et chacun doit essayer de trouver celle qui lui convient. Voici quelques exemples adaptés du site de Santé Canada [7] :

  • Cherchez à créer un équilibre entre le travail et les loisirs
  • Prenez le temps de rire et de vous amuser
  • Apprenez à déléguer, ne cherchez pas à tout faire vous-même
  • Essayez le yoga, la méditation ou la visualisation d’événements heureux
  • Faites de promenades régulières ou écoutez de la musique
  • Faites de l’exercice
  • Apprenez à gérer votre temps (établissez des listes de priorités)
  • Mangez sainement (attention à l’alcool et aux repas trop riches)
  • Prenez du repos et obtenez le sommeil dont votre corps a besoin
  • Discutez de vos problèmes avec vos proches ou un conseiller
  • Prenez des vacances de temps à autre
  • Apprenez à ne pas toujours avoir le dernier mot, soyez moins compétitif
  • N’essayez pas d’être parfait

Chez les personnes qui souffrent d’anxiété, des médicaments peuvent s’avérer utiles, comme les anxiolytiques et certains antidépresseurs [8].

Pour du soutien professionnel, nous sommes là.

Nous offrons des services qui peuvent aider votre médecin à diagnostiquer des troubles liés au stress et à établir si un médicament risque d’être inefficace ou d’entraîner des effets indésirables. Veuillez noter que ces tests ne servent pas à mesurer le niveau de stress, et qu’il s’agit d’une liste non exhaustive.

Vous avez une ordonnance médicale en main pour l’un de ces tests? Prenez rendez-vous en ligne ou joignez le service à la clientèle de Biron Groupe Santé au 1 833 590-2712.

Sources8
  1. Selye H., Le stress de la vie, Paris, Gallimard, 1962.
  2. Société canadienne de recherche intestinale, « Le stress et vos intestins ». https://badgut.org/centre-information/sujets-de-a-a-z/le-stress-et-vos-intestins/?lang=fr. Consulté le 8 octobre 2020.
  3. Mawdsley J.E. et D.S. Rampton, « Psychological stress in IBD: New insights into pathogenic and therapeutic implication », Gut, 2005, 54, p. 1481-1491.
  4. Goucerol, G., Stress et syndrome de l’intestin irritable. https://www.edimark.fr/Front/frontpost/getfiles/23080.pdf. Consulté le 8 octobre 2020.
  5. Choi J.M., J.I. Yang, S. J. Kang et coll., « Association Between Anxiety and Depression and Gastroesophageal Reflux Disease: Results From a Large Cross-sectional Study », J Neurogastroenterol Motil, oct. 2018, 24(4), p. 593-602.
  6. Deding U., L. Ejlskov, M.P.K. Grabas et coll., « Perceived stress as a risk factor for peptic ulcers: a register-based cohort study », BMC Gastroenterol, 2016; 16, p. 140. Publié en ligne le 28 novembre 2016. Consulté le 8 octobre 2020.
  7. Santé Canada, « Comment bien gérer son stress? ». https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies-chroniques/maladie-mentale/comment-bien-gerer-son-stress.html. Consulté le 8 octobre 2020.
  8. Mayo Clinic, « Anxiety Disorders », https://www.mayoclinic.org/diseases-conditions/anxiety/diagnosis-treatment/drc-20350967. Consulté le 8 octobre 2020.
Dr Nicolas Tétreault, Ph. D., CSPQ, FCAB
Dr Nicolas Tétreault, Ph. D., CSPQ, FCAB
Directeur médical, Laboratoire et Innovation
LinkedIn
Dr Nicolas Tétreault, Biochimiste Clinique Directeur médical et innovation, Biron Groupe Santé