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Parole de spécialiste — 14 minutes

Quand les écrans menacent la santé

Dre Johanne Lévesque
Dre Johanne Lévesque
Spécialiste invitée – Neuropsychologue, praticienne en biofeedback et neurofeedback

Avec la collaboration de la spécialiste invitée, Dre Johanne Lévesque, neuropsychologue, praticienne en biofeedback et neurofeedback.

Téléphones intelligents, tablettes, ordinateurs... il est parfois difficile de se passer de ces outils indispensables. Comme on ne veut rien manquer, on les consulte des centaines de fois par jour. Il faut toutefois être vigilant. Cette surconsommation peut parfois devenir problématique.

À quel point sommes-nous connectés?

Un rapport publié par l’Autorité canadienne pour les enregistrements Internet (ACEI) indique que 74 % des Canadiens passent au moins de 3 à 4 heures en ligne par jour et que l’utilisation des médias sociaux est la troisième activité la plus fréquente après la lecture ou l’envoi de courriels et les transactions bancaires en ligne. Soulignons que certains individus consultent même leur cellulaire plus de 250 fois par jour [1].

Nous passons tellement de temps à mettre à jour nos statuts et vérifier ceux de nos amis virtuels que nous avons tendance à oublier les amis réels qui nous entourent. L’arrivée prochaine des réseaux 5G risque d’accentuer cette tendance à nous isoler avec nos écrans. Devant ce phénomène pour le moins préoccupant, il est plus que temps de réfléchir à nos habitudes.

À lire aussi : Petit guide pour se déconnecter des écrans sans perdre la tête

Comment la cyberdépendance affecte-t-elle le corps?

Si les réseaux sociaux occupent une place importante dans notre société, il faut néanmoins être prudent, car le temps passé à les consulter comporte certains risques de plus en plus documentés. Voici les plus communs.

Dopamine et dépendance

Le plaisir que vous éprouvez à consulter les publications de vos amis contribue à la sécrétion de dopamine, un neurotransmetteur associé, entre autres, au plaisir. C’est ce qui explique pourquoi nous devenons dépendants des médias sociaux et qu’il est si difficile de s’en passer. Les gens dépendants qui ne savent pas ce que les autres font et ce qui se passe dans le monde ont souvent l’impression de manquer quelque chose, de ne plus être dans le coup, d’être seuls dans leur coin. Ce qui est très loin de la vérité.

Perturbation du sommeil

Plusieurs études indiquent que les lumières DEL perturbent le sommeil. Il s’agit en fait de la lumière bleue dégagée par les écrans qui est problématique [2]. Cette lumière a un effet sur la mélatonine, une hormone qui joue un rôle dans l’endormissement. Une exposition aux écrans en soirée a pour effet d’inhiber la production de cette hormone, ce qui retarde l’arrivée du sommeil.

Gain de poids

Des recherches tendent à démontrer que même en respectant les recommandations en matière d’activité physique, un usage intensif des ordinateurs, tablettes et cellulaires entraînerait des problèmes de sédentarité et augmenterait les risques d’obésité chez les jeunes [3]. Bien que peu d’études aient été publiés sur les adultes, la tendance semble être la même.

Symptômes anxio-dépressifs

Plusieurs études font le lien entre l’augmentation du temps passé sur les écrans et celle des symptômes anxio-dépressifs chez les adultes [4]. Par exemple, certains se sentent plus inquiets qu’ils ne le devraient, et ce, de plus en plus souvent, mais sans nécessairement faire le lien entre cette anxiété insidieuse et le temps d’écran. Ils peuvent même se sentir plus léthargiques, moins motivés, déprimés et manquer d’énergie. Il a aussi été possible d’établir que l’utilisation des écrans entraîne une diminution de l’empathie et des habiletés sociales [5]. Ainsi, les jeunes qui présentent des problèmes de comportement semblent plus enclins à utiliser les médias sociaux à l’âge adulte et une utilisation accrue des médias sociaux est associée au trouble de la personnalité antisociale chez l’adulte.

À lire aussi : Comment l’utilisation d’un téléphone intelligent influe-t-elle sur mon sommeil ?

Êtes-vous accro?

Les gens dépendants qui ne peuvent décoller de leurs écrans adoptent souvent des comportements similaires à ceux d’autres victimes de dépendances.

  • Mentir : Ils n’hésitent pas à mentir à leurs proches ou à eux-mêmes sur leur utilisation et vont jusqu’à se cacher pour consulter les médias sociaux.
  • Agir de façon agressive : Certains deviennent agressifs si on leur demande de limiter leur temps écran.
  • Éprouver de l’anxiété : Certaines personnes ressentiront un inconfort, voire du stress, à l’idée d’être « déconnectées », par exemple, lorsque le signal n’est pas accessible.

C’est pourquoi les experts estiment qu’il ne faut pas traiter ce problème à la légère et que cette dépendance doit être abordée de la même façon que toute autre dépendance.

Avant d’en arriver au point où la seule pensée de manquer de signal vous donne des vertiges, il est important de décrocher de vos écrans de temps à autre. Le temps récupéré vous permet d’être plus actif, d’échanger avec vos proches ou tout simplement de vous détendre.

Faites-vous du bien! Rangez vos téléphones intelligents, remisez vos tablettes et fermez vos ordinateurs. Vous verrez, vous en ressentirez un bien-être accru.

Sources5
  1. Autorité canadienne pour les enregistrements Internet, Dossier documentaire d’Internet du Canada, 2019. https://cira.ca/fr/resources/corporation/dossier-documentaire/canadas-internet-factbook-2019 [consulté le 5 décembre 2019].
  2. Wahl, S., Engelhardt, M., Schaupp, P., Lappe, C., Ivanov, I. V. « The inner clock—Blue light sets the human rhythm », Journal of Biophotonics, 21 août 2019. https://doi.org/10.1002/jbio.201900102 [consulté le 5 décembre 2019].
  3. Kenney, E.L., Gortmaker, S.L. « United States Adolescents' Television, Computer, Videogame, Smartphone, and Tablet Use: Associations with Sugary Drinks, Sleep, Physical Activity, and Obesity », Journal of Pediatrics, mars 2017, 182:144-149. doi.org/10.1016/j.jpeds.2016.11.015 [consulté le 5 décembre 2019].
  4. Yoon, S., Kleinman, M., Mertz, J., Brannick, M. « Is social network site usage related to depression? A meta-analysis of Facebook-depression relations. » Journal of Affective Disorders, avril 2019, 248:65-72. doi.org/10.1016/j.jad.2019.01.026 [consulté le 5 décembre 2019].
  5. Galica, V.L., Vannucci, A., Flannery, K.M., Ohannessian, C.M. « Social Media Use and Conduct Problems in Emerging Adults », Cyberpsychology, Behavior, and Social Networking, juillet 2017, 20(7):448-452. doi.org/10.1089/cyber.2017.0068 [consulté le 5 décembre 2019].
Dre Johanne Lévesque
Dre Johanne Lévesque
Spécialiste invitée – Neuropsychologue, praticienne en biofeedback et neurofeedback
Dre Johanne Lévesque, neuropsychologue, a initié le neurofeedback au Québec en 2002, avec l’appui de la Fondation Lucie et André Chagnon, dans le cadre de son projet postdoctoral réalisé au Centre de recherche du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine. Ce projet lui a d’ailleurs valu un prix international offert par la Foundation for Neurofeedback and Applied Neuroscience, en raison des avancées importantes qu’avait permis ce projet dans le domaine de la neuromodulation, prix qu’elle a reçu à nouveau en 2014. Elle travaille maintenant exclusivement au sein de ses cliniques Neurodezign.