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Mythe ou fait — 19 minutes

Manger des oranges aide à guérir d’un rhume

27 décembre 2024

Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Vulgarisateur scientifique

Voilà un mythe qui refuse de disparaître! Bien que les oranges soient riches en vitamine C, il est faux de croire que leur consommation peut aider à la guérison du rhume. Ce même malentendu s’applique à de nombreux autres suppléments naturels, souvent vantés comme des solutions miracles contre les infections hivernales.

tranches-agrumes

Mieux comprendre ce mal commun : le rhume

Le rhume, également appelé rhinite ou rhinopharyngite, est une infection virale bénigne et contagieuse qui affecte la muqueuse du nez, des sinus et de la gorge. Il est important de ne pas le confondre avec la grippe (influenza), une infection plus sévère qui touche tout l’appareil respiratoire, y compris les poumons. Plusieurs variétés de virus peuvent causer un rhume, mais plus de 50 % des cas sont attribués au groupe des rhinovirus [1].

Le rhume se transmet généralement par contact direct avec des mains contaminées par les sécrétions nasales d’une personne infectée. Plus rarement, il peut être contracté par inhalation de gouttelettes en suspension dans l’air, qui sont émises lorsqu’une personne infectée tousse ou éternue. La contagiosité du rhume est particulièrement élevée au cours des premiers jours suivant l’apparition des symptômes [2].

Les symptômes du rhume

Les symptômes du simple rhume durent typiquement de 5 à 7 jours, mais peuvent parfois persister jusqu’à 3 semaines [3] :

  • Irritation, mal de gorge ou gêne au niveau du nez;
  • Éternuements et écoulement nasal;
  • Sensation générale de malaise;
  • Fièvre rare et modérée, principalement au début de l’infection.

Traitement

« Un rhume non traité dure une semaine, tandis qu’un rhume traité dure 7 jours! ». Cette vieille boutade indique bien que, dans la majorité des cas, le rhume guérit spontanément en moins de 10 jours. Cependant, des traitements peuvent être recommandés pour les symptômes les plus désagréables :

  • Congestion nasale : utilisez un vaporisateur ou une douche nasale à base d’eau salée, ou un décongestionnant en vaporisateur pour vous soulager.
  • Mal de gorge : prenez des pastilles ou un sirop pour apaiser l’irritation.
  • Fièvre, douleurs musculaires, courbatures : prenez de l’acétaminophène ou de l’ibuprofène pour réduire ces symptômes.

Et les remèdes maison, comme les oranges et le bouillon de poulet?

Manger des oranges, ou boire du jus d’orange riche en vitamine C après l’apparition d’un rhume n’est pas une solution miracle pour en venir à bout. C’est aussi vrai pour une longue liste de remèdes bien connus, qu’ils viennent de l’industrie des produits naturels ou encore des précieux conseils de « grand-maman »  :

  • Bouillon de poulet
  • Ail et oignons
  • Gingembre et miel
  • Eucalyptus et échinacée
  • Extrait de pépins de pamplemousse
  • Comprimés à base de zinc

À défaut de pouvoir guérir le rhume, certains de ces produits, comme un bouillon de poulet chaud, une tisane ou une cuillère de miel peuvent offrir un soulagement temporaire en aidant à apaiser la congestion nasale ou le mal de gorge.

Parmi cette liste, la vitamine C, l’échinacée et le zinc ont fait l’objet d’études spécifiques visant à évaluer leur utilité dans la prévention ou le traitement du rhume. Si certaines recherches ont indiqué des effets positifs, elles ont vite été contredites par d’autres qui ont démontré des résultats opposés [3].

Effets secondaires des traitements alternatifs

Que ces remèdes soient bénéfiques ou non contre le rhume, les produits naturels proposés sont généralement sans danger pour la santé, à condition de ne pas en abuser [4] :

Bouillon de poulet – Rien ne vaut une préparation maison! Les bouillons commerciaux contiennent souvent trop de sel, ce qui peut être moins idéal pour votre santé.

Ail – Souvent recommandé pour ses propriétés, il peut laisser une odeur désagréable persistante dans l’haleine, la sueur et le lait maternel. En grande quantité, il peut provoquer des nausées et des irritations au niveau de la bouche, de l’œsophage et de l’estomac.

Gingembre – Certaines personnes rapportent une sensation de brûlure au moment de l’ingestion ou un arrière-goût désagréable qui peut persister. Le gingembre pourrait également ralentir la digestion et augmenter le risque de saignements.

Échinacée – La consommation d’échinacée peut entraîner des effets secondaires : vertiges, fatigue, maux de tête et troubles digestifs. Elle peut aussi provoquer des réactions allergiques, notamment chez les personnes sensibles à certaines plantes comme l’ambroisie, les chrysanthèmes ou les marguerites. Soyez attentif si vous y êtes prédisposé·e!

Zinc – Attention aux doses élevées – elles peuvent causer une intoxication! Les pastilles de zinc, quant à elles, peuvent provoquer certains effets secondaires désagréables comme  :

  • des nausées et des vomissements;
  • de la diarrhée;
  • une irritation buccale ou des ulcères buccaux;
  • un goût métallique dans la bouche;
  • des symptômes, tels que de la fièvre, de la toux, ou des maux de tête et de la fatigue.

Les sprays à base de zinc peuvent irriter le nez et la gorge, et dans certains cas, entraîner une perte de l’odorat. Pour cette raison, il est préférable de les éviter [4,5].

Interactions médicamenteuses [4] :

Certains suppléments naturels sont capables d’interférer avec la prise de médicaments de toutes sortes  :

  • Gingembre et ail – Peuvent interagir avec les médicaments qui préviennent la formation de caillots sanguins (anticoagulants).
  • Échinacée – (prise pendant plus de 8 semaines) Peut interagir avec les immunosuppresseurs utilisés pour éviter les rejets de greffes et les médicaments qui peuvent entraîner une lésion du foie.
  • Zinc – L’absorption de certains antibiotiques utilisés pour traiter diverses infections peut être diminuée si vous prenez des compléments à base de zinc en même temps. Par conséquent, le zinc doit être pris au moins 2 heures avant ces antibiotiques ou 4 à 6 heures après.
  • Extrait de pépins de pamplemousse – Le jus de pamplemousse (et de quelques autres agrumes) est déjà bien connu pour interférer avec des médicaments soit en accélérant leur métabolisme (ce qui entraîne une perte d’efficacité), soit en diminuant leur élimination et en augmentant ainsi leur toxicité. C’est le cas, entre autres, de certains médicaments utilisés pour abaisser le cholestérol, pour traiter l’hypertension ou l’arythmie, ou de ceux qui agissent sur le système immunitaire. Il est possible que l’extrait de pépins de pamplemousse puisse entraîner une partie de ces interactions.

La liste des produits naturels, de leurs effets secondaires et des interactions médicamenteuses qu’ils peuvent entraîner est longue et complexe. En cas de doute, votre pharmacien·ne ou un·e autre professionnel·le de la santé sont les mieux placés pour vous guider.

Et pourquoi pas un vaccin contre le rhume?

Des vaccins permettent de se protéger contre la grippe, les différentes souches de COVID-19, le virus respiratoire syncytial (VRS) et la pneumonie à pneumocoques. Ces quatre vaccins sont inclus dans les programmes vaccinaux offerts par le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Cependant, aucun vaccin ne permet de lutter contre le rhume causé par les rhinovirus.

D’une part, la grande diversité des virus responsables du rhume (plus de 100) et leur capacité à muter rapidement rendent le développement d’un vaccin très complexe. D’autre part, le rhume est une infection bénigne qui, contrairement à la grippe, à la COVID-19 ou au VRS, ne provoque ni décès ni incapacités graves. Ainsi, les coûts qu’il engendre pour le système de santé ne sont pas assez importants pour justifier un programme d’immunisation coûteux.

Se prémunir contre le rhume

En l’absence de médicaments ou de produits naturels permettant de prévenir efficacement ou de guérir le rhume, et sans vaccin spécifique contre les rhinovirus, la meilleure façon de se protéger demeure l’adoption de mesures préventives simples. Ces gestes, bien ancrés dans nos habitudes depuis la pandémie de la COVID-19, sont faciles à appliquer au quotidien :

  • Se laver les mains fréquemment avec de l’eau et du savon ou utiliser un produit antiseptique (désinfectant) à base d’alcool, surtout si vous partagez un foyer ou un lieu de travail avec des personnes infectées.
  • Nettoyer et désinfecter régulièrement les surfaces fréquemment touchées, comme les comptoirs, les poignées de porte ou les tables.
  • Réduire au minimum les contacts avec les personnes enrhumées et porter un masque pour limiter la propagation du virus pendant la période contagieuse.
  • Se couvrir la bouche et le nez avec un mouchoir jetable lors d’une quinte de toux et éternuer ou tousser dans le pli du coude ou le haut du bras.

Et les oranges?

Les oranges et les autres agrumes regorgent de vitamine C, ce qui est excellent. Toutefois, ils ne permettent ni de prévenir ni de guérir le rhume. Cela dit, intégrer ces fruits, ainsi que d’autres fruits et légumes dans votre alimentation, reste une habitude bénéfique. L’essentiel est de miser sur une alimentation variée et équilibrée.

Cette version actualisée de l’article représente une révision de l’article initialement publié sur notre site web. Nous avons pris en compte les évolutions récentes pour vous offrir de l’information à jour et pertinente.

Sources5
  1. Santé Canada. Fiche technique santé-sécurité. Rhinovirus. https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/biosecurite-biosurete-laboratoire/fiches-techniques-sante-securite-agents-pathogenes-evaluation-risques/rhinovirus.html. Consulté le 26 décembre 2024.
  2. MSSS. Rhume et syndrome d’allure grippale. https://publications.msss.gouv.qc.ca/msss/fichiers/guide-garderie/chap6-rhume-et-sag.pdf. Consulté le 26 décembre 2024.
  3. S Katz. Rhume. Le Manuel Merck (Version grand public). https://www.merckmanuals.com/fr-ca/accueil/infections/virus-respiratoires/rhume. Consulté le 26 décembre 2024.
  4. L Shane-McWorther. Présentation des compléments alimentaires. Le Manuel Merck (version grand public). https://www.merckmanuals.com/fr-ca/accueil/sujets-particuliers/compl%C3%A9ments-alimentaires-et-vitamines/pr%C3%A9sentation-des-compl%C3%A9ments-alimentaires. Consulté le 26 décembre 2024.
  5. La Presse. Des remèdes homéopathiques contre le rhume peuvent entraîner une perte de l’odorat. https://www.lapresse.ca/vivre/sante/201007/20/01-4299643-des-remedes-contre-le-rhume-peuvent-entrainer-une-perte-de-lodorat.php. Consulté le 26 décembre 2024.