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Parole de spécialiste — 14 minutes

Les mammographies de dépistage demeurent-elles une bonne solution?

Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Vulgarisateur scientifique

Le cancer du sein est le type de cancer le plus fréquent chez les femmes. On estime que 12 % des Canadiennes (1 femme sur 8) développeront un cancer du sein au cours de leur vie et que 3 % en mourront. Grâce à l’amélioration des approches diagnostiques et thérapeutiques, le taux de survie à cinq ans a augmenté de façon considérable pour atteindre plus de 85 % au cours des dernières années. Néanmoins, le cancer du sein demeure la deuxième cause de décès par cancer chez les femmes, et on estime que 14 Canadiennes en meurent chaque jour [1].

Comme pour les autres cancers, plus tôt le cancer du sein est diagnostiqué, meilleurs sont les résultats. C’est pourquoi toutes les provinces canadiennes ont élaboré des programmes de dépistage du cancer pour les femmes de 50 à 69 ans. Le Programme québécois de dépistage du cancer du sein, un programme à participation volontaire qui invite les femmes à passer une mammographie de dépistage tous les deux ans, a été lancé en 1998. Il est offert sans frais à toutes les femmes, mais le taux de participation réel est d’environ 60 %, soit 10 points de pourcentage sous l’objectif de participation, fixé à 70 % par le ministère de la Santé et des Services sociaux. De nombreux enjeux ont toutefois été soulevés concernant l’innocuité, le confort et l’efficacité des mammographies de dépistage. Si l’on examine les études, il est assez simple de répondre à la plupart de ces questions.

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Les mammographies sauvent-elles des vies ?

Dans les premiers programmes de dépistage, au cours des années 1980, on a observé une réduction de 20 à 30 % de la mortalité attribuable au cancer du sein, et ce bien avant même l’avènement des nouvelles approches thérapeutiques survenues au cours deux dernières décennies. Donc, oui, il a été clairement démontré que les mammographies sauvent des vies. Cependant, en raison du développement de nouvelles approches thérapeutiques au cours des 20 dernières années, il est devenu beaucoup plus difficile de déterminer quel aspect précis du traitement a le plus contribué à l’augmentation globale (de 75 % à 90 %) du taux de survie au cancer du sein à cinq ans.

La palpation des seins est-elle toujours une forme valide de dépistage ?

Même sous la responsabilité de médecins ou d’infirmières bien formés, le dépistage par l’examen clinique des seins est controversé, et son utilisation est en déclin. Des essais cliniques bien conçus n’ont pas permis de confirmer que l’examen des seins réduit la mortalité attribuable au cancer du sein. De nombreuses lignes directrices, dont celles du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs, ont retiré l’examen clinique des seins de leurs recommandations. Toutefois, cette position ne fait pas l’unanimité. Selon de nombreuses directives organisationnelles, la présence d’une masse palpable accompagnée d’une mammographie normale doit être soumise au moins à une échographie [7].

Les programmes de dépistage ratent-ils certains cancers du sein ?

Une mammographie avec résultat faussement négatif est définie comme une mammographie d’apparence normale, mais où un cancer du sein est en fait présent. On estime que les mammographies de dépistage ne permettent pas de détecter environ 20 % des cancers du sein [6]. Un résultat faussement négatif à un test de dépistage entraîne le retard du traitement requis. Répéter la mammographie tous les deux ans réduira assurément le nombre de résultats faussement négatifs.

Les radiations d’une mammographie sont-elles dangereuses ?

Les mammographies exposent le sein à des radiations. Dans une mammographie typique (deux vues de chaque sein) avec un équipement moderne, l’exposition totale est très faible et correspond à la quantité que chacun reçoit de son environnement naturel pendant environ sept semaines [9]. L’exposition aux rayons X d’une mammographie correspond à 40 % de l’exposition subie lors d’une radiographie de la colonne vertébrale. La plupart des autorités de la santé estiment que le risque d’exposition aux rayons X lors d’une mammographie tous les deux ans est négligeable comparativement au risque de développer un cancer du sein aigu.

À lire aussi : Dans quelle mesure les rayons X représentent-ils un risque pour la santé ?

Les programmes de dépistage entraînent-ils un surdiagnostic ?

Afin de réduire le fardeau sur l’ensemble du système et alléger le stress des patients, chaque programme de dépistage est conçu de manière à déterminer le nombre maximal de personnes qui peuvent être atteintes de cette maladie. Seules les personnes qui ont obtenu un résultat positif à l’examen de dépistage seront soumises à un examen plus effractif et plus coûteux. Les résultats faussement positifs font donc implicitement partie de tous les programmes de dépistage.

Dans le cas du cancer du sein, les examens de confirmation comprennent, dans l’ordre, une mammographie de confirmation, une échographie du sein par ultrasons, dans certains cas une IRM. Une petite proportion d’examen de dépistage positif va engendrer une biopsie du sein. On estime que 9 % de toutes les mammographies de dépistage donnent de faux positifs lorsqu’il n’y a pas de cancer en définitive. Seulement 7 % de tous les examens de dépistage positifs indiquent la présence d’un cancer du sein [2]. Somme toute, pour 1000 examens de dépistage, on découvrira environ 5 à 6 cancers.

Les résultats faussement positifs sont plus fréquents chez les femmes plus jeunes ou encore chez celles qui ont des seins denses, qui ont déjà subi des biopsies du sein, qui ont des antécédents familiaux de cancer du sein ou qui prennent des œstrogènes [3]. La disponibilité d’une mammographie antérieure a un effet important sur la réduction du nombre de résultats faussement positifs. La mammographie numérique [4] et depuis quelques années la venue de la tomosynthèse, nouvelle composante technique intégrée à la mammographie, diminuent à elles seules le nombre de faux positifs d’environ 20 %. L’utilisation de l’intelligence artificielle [5] constitue une autre piste prometteuse pour diminuer le nombre de faux positifs lors de la mammographie de dépistage.

Un surdiagnostic est différent d’un faux positif, qui sera éliminé en procédant à un examen de confirmation. Le surdiagnostic se produit dans le cas d’un cancer du sein qui est bien présent, mais qui ne met pas la vie en danger. C’est le cas des carcinomes in situ, d’extrêmement petits cancers, peu évolutifs sinon pas évolutifs.

Les femmes ayant reçu un surdiagnostic peuvent à leur tour faire l’objet d’un surtraitement, car elles sont exposées à de nombreux effets indésirables inutiles associés au traitement du cancer. Le nombre de ces cas (les cancers in situ) est très difficile à évaluer. Cela dit, il est en fait impossible pour le clinicien (et le patient) de déterminer si ce type de cancer demeurera indolent ou s’il se développera.

Peut-on rendre les mammographies moins douloureuses ?

Comparée à l’échographie ou à l’IRM, la mammographie s’avère un examen qui peut être inconfortable. La durée totale de compression des seins durant la mammographie est inférieure à15 secondes. Bien qu’il existe des moyens de soulager la douleur, de bonnes nouvelles pourraient se présenter à l’avenir pour les femmes aux seins plus sensibles. Un nouvel appareil de mammographie récemment introduit en Ontario et en Alberta (texte en anglais) permet aux femmes de régler elles-mêmes la pression sur leurs seins. Cette approche a déjà été mise à l’essai en Europe et aux États-Unis, et il a été observé que les résultats des mammographies étaient aussi bons que ceux obtenus avec un équipement mammographique traditionnel. Dans de nombreux cas, les femmes ont en fait appliqué elles-mêmes une pression plus forte que celle généralement exercée par le technicien [8].

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Sources9
  1. « Statistiques sur le cancer du sein », Société canadienne du cancer. (Consulté le 1er octobre 2019). https://www.cancer.ca/fr-ca/cancer-information/cancer-type/breast/statistics/?region=qc.
  2. « Programmes organisés de dépistage du cancer du sein au Canada : Rapport sur la performance des programmes en 2007 et en 2008 », Toronto (Ontario), Partenariat canadien contre le cancer, 2013. http://publications.gc.ca/collections/collection_2015/aspc-phac/HP32-1-2008-fra.pdf.
  3. « Limitations of Mammograms: How Often Are Mammograms Wrong? », American Cancer Society. (Consulté le 1er octobre 2019). https://www.cancer.org/cancer/breast-cancer/screening-tests-and-early-detection/mammograms/limitations-of-mammograms.html.
  4. PISANO, Etta D., Constantine Gatsonis, Edward Hendrick, Martin Yaffe, Janet K. Baum, Suddhasatta Acharyya, Emily F. Conant et coll., « Diagnostic Performance of Digital versus Film Mammography for Breast-Cancer Screening », New England Journal of Medicine 353, no 17 (2005) : 1773-83. https://doi.org/10.1056/nejmoa052911.
  5. VYBORNY, C. J. et M. L. Giger, « Computer Vision and Artificial Intelligence in Mammography », American Journal of Roentgenology 162, no 3 (1994) : 699-708. https://doi.org/10.2214/ajr.162.3.8109525.
  6. « Mammograms », National Cancer Institute, (Consulté le 1er octobre 2019). https://www.cancer.gov/types/breast/mammograms-fact-sheet.
  7. PROVENCHER, L., J.C. Hogue, C. Desbiens, B. Poirier, E. Poirier, D. Boudreau, M. Joyal, C. Diorio, N. Duchesne et J. Chiquette, « Is Clinical Breast Examination Important for Breast Cancer Detection? », Current Oncology 23, no 4 (août 2016) : 332. https://doi.org/10.3747/co.23.2881.
  8. Henrot, Philippe, Martine Boisserie-Lacroix, Véronique Boute, Philippe Troufléau, Bruno Boyer, Grégory Lesanne, Véronique Gillon et coll., « Self-Compression Technique vs Standard Compression in Mammography », JAMA Internal Medicine 179, no 3 (janvier 2019) : 407. https://doi.org/10.1001/jamainternmed.2018.7169.
  9. « Mammogram Basics: How Does A Mammogram Work? », American Cancer Society. (Consulté le 1er octobre 2019). https://www.cancer.org/cancer/breast-cancer/screening-tests-and-early-detection/mammograms/mammogram-basics.html.
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Vulgarisateur scientifique
Pendant une cinquantaine d’années, Raymond Lepage a agi comme biochimiste clinique responsable de laboratoires tant publics que privés. Professeur agrégé de clinique à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal et professeur associé à l’Université de Sherbrooke, il a également été consultant, chercheur, expert juriste et conférencier. Auteur ou coauteur de plus de 100 publications parues dans des congrès et des revues scientifiques, il consacre désormais une partie de sa semi-retraite à la vulgarisation scientifique.