Parole de spécialiste — 11 minutes
Une année sans lunchs compliqués
7 juillet 2025

Faire des lunchs, c’est souvent le nerf de la guerre du quotidien. Entre la pression de bien nourrir sa famille (ou de se nourrir!), les comparaisons (merci Instagram!), les enfants aux goûts « difficiles », les allergies à l’école et la peur de manquer de certains nutriments, il y a de quoi se sentir dépassé.
Et si on réécrivait les règles du lunch?
Voici tout ce qu’il faut savoir pour une année de lunchs plus simples, toujours nutritifs… et surtout, plus doux pour soi et pour les nôtres.
Le lunch n’est pas un bulletin de performance parentale
Il existe une pression sourde, souvent intériorisée, qui nous pousse à croire qu’un bon parent fait des lunchs colorés, variés, toujours faits maison et zéro déchet. On se compare, on se juge, ou pire, on se dévalorise devant les boîtes à lunch des autres, qu’on imagine meilleures que les nôtres.
Mais un lunch, c’est un repas. Ce n’est ni une note de passage pour atteindre le succès, ni un miroir de notre valeur. Si on enlève la culpabilité de la boîte à lunch parfaite, on retrouve ce qu’il est vraiment : une façon pratique de nourrir quelqu’un entre deux périodes de la journée [1].
Un aliment transformé n’est pas nécessairement un aliment à éviter
Un lunch nutritif n’a pas besoin d’être cuisiné de A à Z. On peut tout à fait s’appuyer sur des aliments transformés pour composer une boîte à lunch équilibrée, nourrissante et satisfaisante. Du pain de blé entier, une compote sans sucre ajouté, du saumon fumé, des pois chiches en conserve ou du yogourt nature, ce sont tous des aliments transformés, mais encore riches en nutriments et parfaitement compatibles avec une alimentation saine.
Le problème, c’est que lorsqu’on parle de transformation alimentaire, on confond souvent aliments transformés et aliments ultratransformés, comme s’ils avaient le même effet sur la santé [2]. Et ce n’est pas le cas.
Les aliments ultratransformés sont des produits fabriqués à partir d’ingrédients industriels qu’on ne retrouve pas dans une cuisine à la maison (isolats de protéines, agents de texture, arômes artificiels, colorants, édulcorants) et qui sont souvent très pauvres en nutriments [3]. Ce sont ces produits, consommés régulièrement et en grande quantité, qui sont associés à un risque accru de maladies chroniques. Ne pas faire la distinction entre aliments transformés et ultratransformés ajoute une pression inutile sur les épaules des personnes qui essaient simplement de bien manger. Ce n’est pas parce qu’un aliment est transformé qu’il est mauvais. Tout est une question de degré, de fréquence et de nuance.
Quand c’est trop, c’est correct d’acheter tout fait
Il y a des semaines où même couper un légume semble de trop, et les lunchs deviennent un fardeau. Dans ces moments-là, les aliments déjà prêts à manger peuvent devenir nos meilleurs alliés. Des carottes miniatures qu’on laisse dans leur sac d’origine, un bol de chili surgelé glissé dans un contenant isotherme, un wrap acheté à l’épicerie, une salade de fruits dans un contenant refermable, tout ça, c’est un lunch. Ce n’est pas moins bon parce que c’est déjà préportionné et que ce n’est pas déposé dans un contenant sophistiqué. Ce n’est pas un manque d’effort, c’est un acte stratégique et, parfois, une question de survie parentale.
Si on n’a pas l’énergie pour cuisiner, mais le souci de manger équilibré, voici des idées de combinaisons d’aliments transformés minimalement, disponibles en épicerie, qui peuvent composer une boîte à lunch complète, rassasiante et simple à assembler.
- Pita de blé entier + houmous du commerce + crudités prélavées + yogourt grec + noix non salées
- Chili surgelé + craquelins de grains entiers + mini fromage + fruit frais
- Wrap du commerce (au poulet ou végé) + compote sans sucre ajouté + graines de citrouille
- Salade de pâtes froide achetée + œuf dur + carottes miniatures + barre tendre aux grains entiers
- Tofu fumé tranché + salade de couscous du commerce + pois chiches rincés + raisins secs
- Edamames surgelés (décongelés) + rouleaux de printemps du commerce (aux crevettes ou végé) + sauce aux arachides ou tamari + fruit frais
Ces combos ne sont pas là pour impressionner ou être partagés sur Instagram, mais ils nourrissent bien. Et ça, c’est ce qui compte vraiment.
Viser la constance, pas la performance
On ne fera pas des lunchs parfaits tous les jours, et c’est tant mieux. Ce qu’on vise, ce sont des habitudes assez bonnes, assez régulières et assez stables pour soutenir l’énergie et le plaisir de manger [4,5]. Si un ou deux lunchs de la semaine sont moins équilibrés que les autres, ce n’est pas un échec. En nutrition, on évalue l’équilibre sur plusieurs jours, parfois même sur plusieurs semaines. En pratique, cela signifie que quelques lunchs moins nutritifs dans une semaine ne compromettent pas l’alimentation globale, tant que l’équilibre se maintient sur plusieurs jours ou semaines. Et c’est exactement ce dont le corps et le parent fatigué ont besoin : de la constance plutôt que de la performance.
Soutenir l’énergie jusqu’au prochain repas
Un lunch équilibré, c’est un repas qui aide à tenir le coup jusqu’au retour à la maison, sans fringale majeure ni baisse d’attention en plein après-midi. Pour y arriver, on mise sur une combinaison d’aliments rassasiants : une source de protéines santé, une base de glucides, des fibres, un peu de gras et, surtout, du plaisir [4,5].
Chez les enfants, c’est encore plus important [5]. Leur corps est fait pour manger souvent, mais en petites quantités. Ils ont des besoins nutritifs élevés pour grandir, bouger, apprendre, mais un plus petit estomac pour tout emmagasiner en un seul repas. Fractionner le lunch dans plusieurs petits contenants peut rendre le tout plus agréable pour eux, plus réaliste selon leur appétit du moment.
Ramener les classiques
Quand on comprend que l’objectif d’un lunch, c’est de nourrir suffisamment pour tenir jusqu’au prochain repas et d’être nutritif la majorité du temps (et pas tout le temps), on réalise qu’on n’a pas besoin de réinventer la roue chaque midi. Les routines, en alimentation, sont un superpouvoir sous-estimé. Avoir trois ou quatre formules qui fonctionnent, comme une salade de pâtes, un sandwich au thon, des bouchées de tofu avec des crudités, permet de réduire le stress, de gagner du temps et de garder son énergie pour autre chose. Si la boîte contient les mêmes aliments que mardi dernier, tant mieux. C’est souvent quand on change une routine bien rodée que les enfants s’en plaignent… pas l’inverse.
Les restes, sous-estimés et redoutablement efficaces
Dans une routine bien rodée, les restes sont des alliés précieux. Un reste de soupe, un plat de riz ou une portion du repas du dimanche soir qu’on a doublée en quantité peuvent facilement devenir un lunch complet, sans effort supplémentaire. C’est une façon intelligente de gagner du temps, de limiter le gaspillage et de proposer un repas souvent plus nutritif qu’un lunch improvisé à la dernière minute. Réchauffer un reste et le placer dans un contenant isotherme ou le manger froid, ce n’est pas une solution de secours, c’est une stratégie efficace. Et bien souvent, les enfants (et les grands) adorent retrouver leurs plats préférés.
Le contenant isotherme est idéal pour garder au chaud des plats comme des soupes, du riz, des pâtes, des mijotés ou des plats en sauce [6]. Avant d’y verser les aliments, remplissez-le d’eau bouillante, fermez-le et laissez reposer 5 à 10 minutes. Pendant ce temps, chauffer le repas jusqu’à ce qu’il soit bien fumant et que la vapeur monte lorsqu’on le brasse. Videz l’eau, ajoutez le repas chaud et refermez rapidement. Cette méthode permet de mieux conserver la chaleur et de réduire les risques liés aux bactéries qui peuvent se développer si le repas est insuffisamment chaud.
Composer avec les contraintes des allergies alimentaires
Quand un enfant a des allergies ou que l’école impose des restrictions, c’est un stress qui s’ajoute à la préparation des lunchs déjà compliqués. On veut éviter les traces, prévenir les réactions, informer les adultes côtoyant l’enfant, tout en évitant de faire sentir au jeune qu’il est différent. C’est un vrai défi, qu’on n’a pas le choix de relever. Heureusement, un lunch sans allergène peut être tout aussi varié, satisfaisant et nourrissant que n’importe quel autre lunch.
Un bon réflexe à adopter, c’est de repérer les allergènes prioritaires identifiés en gras ou à la fin de la liste des ingrédients des aliments sélectionnés, tels que les arachides, les noix, le lait, les œufs, le blé, le soya, le sésame, les poissons, les fruits de mer, la moutarde et les sulfites [7]. On évite les produits où l’on voit la mention « peut contenir » ou « fabriqué dans une usine qui utilise… » selon le cas. C’est une étape simple pour faire des choix sécuritaires sans avoir à tout cuisiner soi-même.
On peut aussi contribuer à créer un environnement scolaire sécuritaire et inclusif pour nos enfants, par exemple, en étiquetant clairement les contenants, en communiquant avec les enseignants à l’avance, ou en informant les autres parents lors des sorties ou activités spéciales.
Nourrir, pas impressionner
Les lunchs, ce n’est ni un objectif de performance ni un test de parentalité. C’est une tâche quotidienne, une façon concrète de prendre soin de soi et des autres dans un monde qui roule trop vite. Préparer un lunch, aussi simple ou ordinaire soit-il, reste un geste d’attention et de présence. Et les jours où on a l’impression que ce qu’on a mis dans la boîte n’a rien de spécial, on peut toujours y glisser un petit mot attentionné. Juste pour rappeler à la personne qui le reçoit qu’on pense à elle. Parce que parfois, c’est ça qui nourrit le plus.
Sources8
- Regnière G. Boîte à lunch : reflet des attitudes éducatives parentales et incidences sur le comportement de l’enfant [mémoire de maîtrise]. Trois-Rivières (QC) : Université du Québec à Trois-Rivières; 1999 [cité le 7 juill. 2025]. Disponible sur : https://depot-e.uqtr.ca/id/eprint/3576/1/000659013.pdf
- . Brassard D, Laramée C, Provencher V, et al. Consumption of low nutritive value foods and cardiometabolic risk factors among French-speaking adults from Quebec, Canada: the PREDISE study. Nutr J. 2019;18(1):49.
- Monteiro CA, Cannon G, Moubarac JC, Levy RB, Louzada MLC, Jaime PC. The UN Decade of Nutrition, the NOVA food classification and the trouble with ultra-processing. Public Health Nutr. 2018;21(1):5-17.
- Gouvernement du Canada. Guide alimentaire canadien [Internet]. Ottawa (ON) : Santé Canada; [date inconnue] [cité le 7 juill. 2025]. Disponible sur : https://guide-alimentaire.canada.ca/fr/
- Gouvernement du Canada. Alimentation saine à l’école [Internet]. Ottawa (ON) : Santé Canada; [date inconnue] [cité le 7 juill. 2025]. Disponible sur : https://guide-alimentaire.canada.ca/fr/conseils-pour-alimentation-saine/alimentation-saine-ecole/
- Gouvernement du Québec. Précautions pour les boîtes à lunch [Internet]. Québec (QC) : Gouvernement du Québec; [cité le 7 juill. 2025]. Disponible sur : https://www.quebec.ca/sante/alimentation/salubrite-aliments-prevention-risques/salubrite-aliments-domicile/conservation-aliments/precautions-boites-lunch
- Allergies Alimentaires Québec. Association québécoise des allergies alimentaires [Internet]. Montréal (QC) : Allergies Alimentaires Québec [cité le 7 juill. 2025]. Disponible sur : https://allergies-alimentaires.org/
- Tremplin Santé. Recettes pour une alimentation saine chez les jeunes [Internet]. Montréal (QC) : Fondation Tremplin Santé [cité le 7 juill. 2025]. Disponible sur : https://tremplinsante.ca/recettes/
