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Parole de spécialiste — 10 minutes

Démystifions trois types de vaginite

16 février 2024

Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Vulgarisateur scientifique

Les vaginites sont courantes. On estime que 75 % des femmes contracteront au moins une vaginite au cours de leur vie et qu’environ la moitié en auront plusieurs [1]. Cette inflammation de la paroi du vagin se manifeste par un écoulement vaginal anormal et parfois odorant, de l’irritation, des démangeaisons (prurit) et une rougeur (érythème) de la paroi vaginale.

Ces désagréments sont généralement passagers, mais s’ils ne sont pas traités, ils peuvent entraîner des conséquences plus graves, comme des co-infections (dont des ITSS comme le VIH), des complications pendant la grossesse, un accouchement prématuré, de l’infertilité, etc.

Quels sont les différents types de vaginite ?

Le vagin abrite naturellement une importante flore bactérienne composée à plus de 90 % de lactobacilles. Ces bactéries sont très utiles, car l’acide lactique qu’elles produisent maintient le pH acide du vagin et prévient les infections par d’autres bactéries indésirables. Les problèmes surviennent quand cet équilibre est bousculé et que les lactobacilles ne vous protègent plus contre les microbes pathogènes qui peuvent causer une infection. Dans 70 à 90 % des cas, une vaginite est infectieuse, mais elle peut être non infectieuse dans 10 à 30 % des cas [2].

Vaginites infectieuses

  • Vaginose bactérienne : de 40 à 50 % des cas
  • Vaginite à levures (candidose) : de 20 à 25 % des cas
  • Vaginite parasitaire (trichomonase) : de 15 à 20 % des cas

Vaginites non infectieuses

  • Vaginite d’irritation : peut être causée par des antibiotiques, un corps étranger (tampon hygiénique ou condom), des savons ou d’autres produits d’hygiène vaginale , une mauvaise hygiène corporelle, une dermatose, une maladie inflammatoire systémique comme l’arthrite rhumatoïde ou le lupus, etc.
  • Vaginite atrophique : se produit chez des femmes ménopausées ou ayant un faible taux d’œstrogènes. Un faible taux d’œstrogènes entraîne une sécheresse et un amincissement de la paroi vaginale, qui devient plus facilement irritable.

Quels sont les facteurs de risque des vaginites infectieuses ?

Vaginose bactérienne

La vaginose, qui n’est pas toujours symptomatique, est une modification de la composition de la flore vaginale, soit une diminution des lactobacilles et une augmentation des autres types de bactéries. Bien que la vaginose bactérienne ne soit pas considérée comme une ITSS, elle comporte les mêmes facteurs de risque (voir Vaginite parasitaire ci-dessous). Toutefois, cette infection survient également chez les femmes n’ayant jamais eu de rapport sexuel avec pénétration vaginale.

Vaginite à levures (candidose)

Caractérisées par la prolifération du champignon Candida albicans, les candidoses surviennent souvent sans raison apparente. Cependant, elles se produisent plus fréquemment chez les femmes :

  • Enceintes (niveau d’œstrogènes plus élevé)
  • Diabétiques
  • Immunosupprimées
  • Traitées aux antibiotiques

Les antibiotiques ont tendance à perturber l’équilibre de la flore vaginale et le pH du vagin, ce qui favorise la multiplication des levures. De ce fait, un tiers à un quart des femmes développent une candidose pendant ou après la prise d’antibiotiques.

Vaginite parasitaire (trichomonase)

Causée par le parasite Trichomonas vaginalis, la trichomonase est considérée comme une ITSS non virale. Ses facteurs de risque sont donc les mêmes que pour les autres ITSS courantes :

  • Partenaires sexuels multiples
  • Antécédents d’ITSS
  • Un ou plusieurs épisodes antérieurs de trichomonase
  • Relations sexuelles non protégées

Les vaginites peuvent également être causées par une infection transmissible sexuellement et par le sang (ITSS), comme la gonorrhée ou la chlamydia.

Quel est le diagnostic des vaginites ?

L’apparence des pertes vaginales et la présence d’autres symptômes peuvent indiquer au professionnel de la santé la nature probable de la vaginite et, dans le cas d’une candidose, permettre à la personne atteinte de se procurer des médicaments en vente libre. Cependant, pour confirmer le diagnostic, le professionnel de la santé devra recourir à des tests en laboratoire.

Apparence des pertes Autres symptômes Diagnostic possible
Rougeâtres ou brunâtres Saignements anormaux, douleurs pelviennes Cycles menstruels irréguliers, très rarement cancer du col ou de l'endomètre
Troubles ou jaunâtres Saignements entre les règles, incontinence urinaire, douleurs pelviennes Gonorrhée
Mousseuses, jaunâtres ou verdâtres, malodorantes Douleurs en urinant, démangeaisons Vaginite parasitaire (trichomonase)
Rosées Érosion de la paroi utérine après l'accouchement
Épaisses blanchâtres, grumeleuses Rougeurs et gonflement à la vulve et au vagin, douleurs, démangeaisons, relations sexuelles douloureuses Vaginite à levures (candidose)
Homogènes texture laiteuse, blanchâtres, grisâtres, jaune-vert, odeur de poisson Démangeaisons et sensation de brûlure, rougeurs, gonflement du vagin et de la vulve, surtout en cas de co-infection. Près de la moitié des femmes atteintes ne présentent pas de symptômes Vaginose bactérienne

Comment traiter une vaginite infectieuse ?

Le traitement des vaginites dépend de la nature de l’agent causal [3].

Vaginose bactérienne

Un traitement antibiotique par voie orale ou topique est privilégié chez les femmes qui ne sont pas enceintes. Chez les femmes enceintes, le traitement par voie orale est recommandé afin d’éviter des complications. Le dépistage de vaginose durant la grossesse peut être effectué chez certaines femmes à risque, mais il n’est pas recommandé d’emblée. Cependant, une vaginose bactérienne avec des symptômes lors de la grossesse doit être traiter pour éviter les complications de grossesse.

Selon la situation, les médicaments recommandés sont le métronidazole 500 mg par voie orale pendant 5 à 7 jours, un gel de métronidazole ou une crème intravaginale de clindamycine. Une dose orale unique de métronidazole est aussi possible, mais le taux de guérison est de 85 % et le taux de récidive est plus élevé, soit de 30 à 50 % à 1 mois.

Vaginite à levures

La vaginite à levures simple est traitée à l’aide d’antifongiques, comme le fluconazole administré par voie orale et le clotrimazole administré par voie topique. Chez la femme enceinte, le traitement topique à base de clotrimazole est recommandé, mais il serait mieux qu’un médecin doit confirmer le diagnostic avant tout traitement.

Une personne qui souffre d’une vaginite à levures peut se procurer du clotrimazole en vente libre dans les pharmacies ou consulter un pharmacien, qui pourra lui prescrire du fluconazole. Les symptômes s’améliorent généralement dans les deux à trois jours suivant le début du traitement.

Vaginite parasitaire (trichomonase)

La trichomonase requiert un antibiotique oral efficace pour éliminer le parasite en cause. Le traitement peut prendre la forme d’une seule dose massive de 2 g de métronidazole ou de doses plus faibles de métronidazole pendant 7 jours. Comme pour n’importe quel antibiotique, le métronidazole doit être pris jusqu’à la fin de la période prescrite.

Il est important que tous les partenaires sexuels de la personne atteinte soient traités en même temps que celle-ci afin d’éviter les récidives. Les personnes doivent cesser les rapports sexuels jusqu’à la disparition complète des symptômes et la fin du traitement.

Quelles sont les complications des vaginites infectieuses possibles ?

Vaginose bactérienne

La vaginose bactérienne augmente le risque de contracter ou de propager une ITSS concomitante. Les effets néfastes se présentent surtout pendant la grossesse avec un risque accru d’infection du liquide amniotique, un travail et un accouchement prématurés et des infections post-accouchement ou post-avortement.

Vaginite à levures

Les complications de la vaginite à levures sont rares. La récidive de l’infection et de ses symptômes déplaisants constitue la « complication » la plus fréquente. Les patientes enceintes peuvent aussi contaminer le fœtus, ce qui peut entraîner des infections systémiques chez le nouveau-né, en particulier s’il est prématuré ou présente un faible poids à la naissance [4].

Vaginite parasitaire (trichomonase)

En plus d’être transmissible, la trichomonase augmente le risque de contracter une autre ITSS, dont le VIH. Elle peut aussi entraîner le développement d’une maladie pelvienne inflammatoire (infection de l’utérus et des trompes de Fallope) ou l’infertilité. Les femmes enceintes sont plus susceptibles d’accoucher prématurément et de donner naissance à un nouveau-né de faible poids [5].

Comment prévenir les vaginites infectieuses ?

Vaginose bactérienne

  • Éviter les douches vaginales et les autres produits d’hygiène vaginale, comme les vaporisateurs, les savons parfumés ainsi que les serviettes et les tampons désodorisants.
  • Aux toilettes, toujours s’essuyer de l’avant vers l’arrière (du vagin vers l’anus).
  • Porter des sous-vêtements en coton ou recouverts de coton.
  • Changer fréquemment de tampon ou de serviette hygiénique.
  • Se protéger pendant les relations sexuelles (condom, carré de polyuréthane) et limiter le nombre de partenaires.

Vaginite à levures

  • Limiter l’usage des produits d’hygiène vaginale comme les savons parfumés, les gels, les crèmes, etc.
  • Déterminer, avec l’aide du pharmacien, les traitements qui peuvent augmenter le risque de candidose (antibiotiques, cortisone, certains contraceptifs oraux, chimiothérapie).
  • Éviter de garder trop longtemps un maillot de bain mouillé ou de porter des vêtements serrés en fibres synthétiques. Privilégier les vêtements amples en coton.
  • Utiliser un lubrifiant personnel en évitant les produits trop parfumés et irritants.
  • Contrôler son diabète et éviter une alimentation riche en sucres.
  • Éviter le stress et d’autres conditions qui affaiblissent le système immunitaire.

Vaginite parasitaire

Comme la trichomonase est une ITSS, les précautions sont donc les mêmes que pour les autres ITSS. Elles consistent à éviter ou à limiter les relations sexuelles, ou encore à se protéger. Voici quelques moyens de protection qui permettent également de protéger son ou sa partenaire contre la contamination par Trichomonas vaginalis.

  • Utiliser un condom lors de toute relation vaginale ou anale.
  • Utiliser un condom ou une digue dentaire en polyuréthane.
  • Éviter de partager des jouets sexuels ou recouvrir ceux-ci d’un condom neuf avant toute utilisation.
Sources5
  1. Clinique médicale l’Actuel. La vaginite est-elle fréquente? https://cliniquelactuel.com/La_vaginite_est_elle_frequente [consulté le 8 février 2024]
  2. Sobel, Jack D. Vaginitis in adults: Initial evaluation. UpToDate, https://www.uptodate.com/contents/vaginitis-in-adults-initial-evaluation [consulté le 8 février 2024]
  3. INESS. Protocole médical national – Pertes vaginales inhabituelles. Institut national d’excellence en santé et en services sociaux, juin 2019, https://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/INESSS/Ordonnances_collectives/Vaginite/INESSS_Protocole_medical_national_pertes-vaginales-inhabituelles_Final.pdf
  4. Arya, N.R., Naureen, B. Candidiasis. StatPearls, 29 mai 2023, https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK560624/
  5. New York State Department of Health. Trichomoniasis. A common curable STD. https://www.health.ny.gov/publications/3839.pdf [consulté le 8 février 2024]
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Vulgarisateur scientifique
Pendant une cinquantaine d’années, Raymond Lepage a agi comme biochimiste clinique responsable de laboratoires tant publics que privés. Professeur agrégé de clinique à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal et professeur associé à l’Université de Sherbrooke, il a également été consultant, chercheur, expert juriste et conférencier. Auteur ou coauteur de plus de 100 publications parues dans des congrès et des revues scientifiques, il consacre désormais une partie de sa semi-retraite à la vulgarisation scientifique.