Skip to contentSkip to navigation

Santé A à Z  —  8 minutes

Dette immunitaire, des effets pervers après deux ans de pandémie

13 juillet 2022
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Vulgarisateur scientifique

La longue période de protection individuelle due à la COVID-19 a permis à nos corps d’éviter la plupart des autres virus saisonniers. Maintenant, partout dans le monde, les organismes de santé notent une recrudescence des maladies saisonnières comme la grippe. Il semblerait donc que nos défenses immunitaires aient été affaiblies par ce moment d’inactivité: il aurait engendré une dette immunitaire chez une partie de la population.

Qu’est-ce qu’une dette immunitaire?

Une dette immunitaire est une diminution de la défense immunitaire de l’organisme lorsqu’il n’a pas été en contact avec des virus ou des vaccins durant une longue période. Depuis janvier 2020, les mesures sanitaires strictes dues à la COVID-19 ont ainsi occasionné chez certains une dette immunitaire d’un an ou plus (d’une saison de grippe à l’autre, par exemple). La dette sera plus importante avec l’addition d’années supplémentaires sans exposition aux virus habituels.

L’organisme est alors plus vulnérable aux infections bactériennes et virales communes, comme l’influenza, le virus respiratoire syncytial (VRS) et la varicelle. Dans les faits, les défenses immunitaires sont moins efficaces pour répondre à une agression bactérienne ou virale après une trop longue période d’inactivité. C’est un peu comme un sportif au repos depuis trop longtemps qui devrait tout à coup lutter pour obtenir une médaille aux Jeux olympiques.

L’effet boomerang des mesures sanitaires

Les mesures mises en place pour contrer la pandémie partout sur la planète ont permis de limiter en grande partie la propagation du SRAS-C0V-2. Parallèlement, elles ont aussi réduit la transmission des autres pathogènes au sein de la communauté. Les cas de grippes et autres virus ont de ce fait nettement diminué durant la pandémie, ce qui a permis de ne pas ajouter à la surcharge du système de santé. Dans la plupart des pays occidentaux, le nombre de cas de grippe saisonnière durant l’hiver 2020 a connu une baisse de 99 %, du jamais vu [1].

Cependant, avec la reprise progressive des activités, la réouverture des écoles et l’abandon des principales mesures d’hygiène, les virus circulent à nouveau dans la communauté. Et en fonction de leur dette immunitaire, certaines personnes sont temporairement plus à risque que d’autres de contracter ces virus.

Des profils plus à risque

Les personnes âgées, les personnes immunosupprimées et les enfants font généralement partie des populations les plus fragiles face aux agents pathogènes. C’est encore plus vrai après la période d’isolement vécue durant la pandémie de COVID-19. Pendant cette période, une baisse d’intérêt pour les campagnes de vaccinations annuelles a été observée, ce qui comporte un risque, soit l’augmentation éventuelle des hospitalisations de personnes âgées pour traiter les infections saisonnières.

Par ailleurs, les personnes atteintes de maladies chroniques ou d’insuffisances en matière de santé sont aussi plus à risque face à la hausse des transmissions de virus dans la population. Elles devront donc prendre des précautions particulières lors des flambées d’infection de la période hivernale afin de pallier leur dette immunitaire.

Pour toutes ces personnes plus à risque, il est plus important que jamais de bénéficier des campagnes de vaccination annuelles, alors que les vaccins sont administrés gratuitement.

Augmentation des maladies infantiles et des maladies transmissibles par voie aérienne

Depuis l’hiver 2021, la diminution progressive de certaines mesures de protection a fait exploser les cas d’infections virales, particulièrement chez les enfants.

Les maladies infantiles, comme la varicelle et la rougeole, dont les cas avaient considérablement diminué en 2020, reviennent en force. Certains enfants, qui avaient évité ces maladies jusqu’à maintenant, pourraient en être affectés à un âge plus avancé et risquer de moins bien les supporter. Il faut donc s’attendre à une augmentation des infections dans les années à venir, mais aussi à des complications et à une hausse des cas sévères [2].

Les cas d’infection dus au VRS ont également connu une forte augmentation dans plusieurs pays à cause de la sous-exposition des enfants au virus respiratoire syncitial dans les mois précédents. Ce virus, qui touche plus durement les jeunes enfants de moins de 2 ans, entraîne une hospitalisation dans 1 à 3 % des cas. L’Institut national de la santé publique du Québec a enregistré plus de 500 cas lors de la seule semaine du 6 novembre 2021. En septembre de la même année, les cas étaient plus nombreux que durant certains hivers, alors que le VRS circule généralement de novembre à avril [3].

Les cas de maladies transmissibles par voie aérienne vont continuer à exploser, et la dette immunitaire d’une partie de la population risque de les rendre encore plus virulentes [1].

Comment savoir si l’on souffre d’une dette immunitaire?

Il est difficile de mesurer avec précision le niveau de défense immunitaire d’un individu. En théorie, un système immunitaire est plus efficace lorsqu’il est régulièrement sollicité. Il apparaît donc logique de penser que les défenses d’une grande partie de la population sont amoindries depuis le début de la pandémie.

Il peut également arriver qu’un système immunitaire peu sollicité développe des maladies auto-immunes (dysfonctionnement du système immunitaire qui attaque les propres constituants de l’organisme).

Peut-on s’en prémunir?

Il n’existe pas de moyens supplémentaires de se protéger en cas de dette immunitaire. Face aux virus, les mesures de protection sont toujours à peu près les mêmes. Elles consistent à se faire vacciner et à adopter des mesures de protection, comme le port du masque ou le lavage de mains fréquent.

Difficile de réinventer la roue. En revanche, la population sera à nouveau infectée par tous ces virus et retrouvera d’ici quelques années un niveau d’immunité sensiblement identique à celui d’avant l’ère pandémique.

Dans l’immédiat, il faut probablement vous attendre à ce que votre prochaine grippe ou votre prochain rhume soit un peu plus « costaud » qu’avant la pandémie, le temps que votre défense immunitaire se remette en forme après un repos prolongé.

Pour du soutien professionnel, nous sommes là.

Nous offrons des services qui peuvent aider votre médecin à diagnostiquer les infections respiratoires, les streptocoques, les microorganismes responsables de diarrhées et les problèmes de santé qui y sont associés et à déterminer le traitement approprié.

Vous avez une ordonnance médicale en main pour ce test? Prenez rendez-vous en ligne ou joignez le service à la clientèle de Biron Groupe Santé au  1 833 590-2712.

Sources3
  1. « Dette immunitaire: serons-nous davantage malades cet hiver? ». Québec science. Novembre 2021. https://www.quebecscience.qc.ca/sante/dette-immunitaire-serons-nous-davantage-malades-cet-hiver/
  2. « Pediatric Infectious Disease Group (GPIP) position paper on the immune debt of the COVID-19 pandemic in childhood, how can we fill the immunity gap? ». Science Direct. Août 2021. https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2666991921001123?via%3Dihub
  3. « Respiratory syncytial virus: paying the immunity debt with interest ». The Lancet. 22 octobre 2021. https://www.thelancet.com/pdfs/journals/lanchi/PIIS2352-4642(21)00333-3.pdf
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Raymond Lepage, Ph. D., Docteur en biochimie
Vulgarisateur scientifique
Pendant une cinquantaine d’années, Raymond Lepage a agi comme biochimiste clinique responsable de laboratoires tant publics que privés. Professeur agrégé de clinique à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal et professeur associé à l’Université de Sherbrooke, il a également été consultant, chercheur, expert juriste et conférencier. Auteur ou coauteur de plus de 100 publications parues dans des congrès et des revues scientifiques, il consacre désormais une partie de sa semi-retraite à la vulgarisation scientifique.